JEUNESSE ET MIXITÉ : RIGUEUR OU PUDEUR ?
Assalam alaykoum wa rahmatoullah !
Si l’on se retrouve aujourd’hui dans la rubrique éducation, c’est pour parler d’un sujet plutôt récurrent, mais sous un angle novateur ! Vous l’aurez deviné (ou plutôt lu dans le titre…), il s’agit de la mixité.
Malheureusement, notre oumma n’est pas épargnée par les abus de ce côté. Qu’il s’agisse d’un manque de vigilance, de l’effet de groupe ou tout simplement d’inconscience, la pudeur est malheureusement de plus en plus délaissée. Là où les jeunes musulmans devraient être les plus respectueux envers eux-mêmes et les autres (en l’occurrence, le sexe opposé), les dérapages sont malheureusement très nombreux et généralisés. Qu’il s’agisse du milieu associatif, scolaire, professionnel…La mixité a ses dangers qui sont trop souvent ignorés. Un problème dont l’essence est incontestablement la banalisation. Dans un environnement où la débauche est totalement normalisée et synonyme de liberté individuelle, les actes considérés « minimes » tels que les regards, par exemple, sont non seulement tolérés, mais encouragés par une jeunesse musulmane qui n’a pas forcément l’intention de mal faire mais revoit en quelque sorte ses exigences à la baisse en se comparant aux autres. Une logique du « moins pire »…
Or, si l’abus de la mixité peut paraître sans importance, ou alors une « mauvaise passe de jeunesse », les conséquences sont bien réelles. Si vous êtes prêts à vous embarquer avec moi dans une lecture destinée à purifier notre nafs et nos relations de ce qu’elles ont de mauvais et d’ambigu, bienvenue !
La particularité de cette entrevue (car je vous attends en commentaire !) et ce qui en fait, à mon sens, une intervention un peu spéciale concernant ce sujet sensible, est le fait qu’elle s’effectuera entre jeunes d’une même génération. Nous avons tous quatorze, quinze, seize ans ou plus…Nous vivons les mêmes situations et j’espère pouvoir tirer profit de ces similitudes loin d’une tirade moralisatrice sans lien avec notre univers.
Petite précision, on prend ce contenu avec positivité pour améliorer l’avenir, et on déculpabilise ! Si vous vous rendez compte que vous avez pu déraper par le passé, ce n’est rien d’irréparable, loin de là. Le musulman est destiné à s’améliorer perpétuellement, et qui sait ? Peut-être bien qu’Allah vous a fait tomber sur cet article dans le but de vous corriger…
Sur ce, commençons !
La mixité, c’est haram ?
Pour commencer, il est essentiel de définir la mixité et surtout de la diviser en deux sortes. Car la mixité, dans l’absolu, n’est pas forcément négative, comme on peut le voir dans la Sirâh du Prophète (ﷺ). Shîfa bint Abdillah (qu’Allah l’agréée) ne travaillait-elle pas pour Umar ibn al-Khattab comme surveillante des marchés ? Ce dernier ne consultait-il pas régulièrement notre mère Aîsha (qu’Allah soit satisfait d’elle) après la mort du Prophète (ﷺ) concernant des questions religieuses dont elle était la meilleure informée ? Khadîja bint Khuwaylîd (qu’Allah soit satisfait d’elle) n’embauchait-elle pas des hommes pour acheminer ses marchandises jusqu’à divers comptoirs commerciaux de la péninsule arabique ?
Autant d’exemples qui contredisent certains rigoristes qui affirmeraient que le mélange serait interdit dans l’absolu, et qui nous confirment que dans le milieu professionnel ou scolaire, il n y a aucun mal à ce que les deux genres se côtoient pour s’apporter mutuellement, contribuer à la vie en communauté, à la formation des jeunes générations….
Néanmoins, cela doit être correctement géré. Premièrement, d’un point de vue individuel (le respect du hijab, l’abaissement du regard, ne pas se retrouver seul à seule entre étrangers) et deuxièmement, d’un point de vue collectif (ne pas former de groupes mixtes sans but précis, ne pas lésiner sur les rappels en cas de débordement…).
Ainsi, on distingue deux sortes de mixité : celle se déroulant dans le respect de soi et des autres, sans ambiguïté, pour un objectif précis dont découle un cadre spécifique. Et celle n’étant nullement gérée ni cadrée par les valeurs de notre religion , où les comportements se dégradent et les mauvaises intentions s’installent, que l’on observe malheureusement bien trop souvent. Cette dernière est très souvent générée par les discussions « de tout et de rien » !
À nous donc, mes chers frères et sœurs, d’être les gardes-fous de notre dignité en nous éloignant de toute attitude inappropriée, que ce soit en tant qu’auteur ou récepteur.
Quelles sont les attitudes inappropriées ?
C’est un beau principe, mais maintenant, comment l’appliquer ? En effet, je peux tout à fait concevoir qu’il soit difficile de distinguer ce qui est acceptable de ce qui ne l’est pas ! Surtout dans une société où le respect des mœurs s’est détérioré et le sans-gêne invité. À mon humble avis,en réalité, nous ressentons tout de suite s’il y a un problème ou pas…Le regard appuyé d’une personne sur vous a peu de chance de signifier de l’admiration pour votre vêtement ou votre sac à main ! Tout comme il est simple de différencier une discussion utile et nécessaire sur un sujet quelconque, et une conversation totalement futile qui emmène aux bavardages générateurs de ce que nous savons. Rappelons à ce sujet que le bavardage est désapprouvé en Islam, que ce soit entre deux personnes de sexe différent ou non ! Il s’agit d’une perte de temps et de foi, bien inutile au musulman conscient dont le but est de s’enrichir spirituellement dans ses relations avec ses pairs.
Et s’il s’avère que ce n’est pas si évident, que vous n’arrivez pas forcément à distinguer le bon du mauvais dans tout cela, je vous renvoie à cet incroyable hadith rapporté dans les 40 hadiths d’al Nawawi :
D’après Abou Muhammad Al-Hassan ibn ‘Alî Ibn Abî Tâlib, le petit-fils du Messager d’Allah (ﷺ) et son protégé (Qu’Allah l’agrée) a dit : « J’ai retenu cette parole du Messager d’Allah (ﷺ) : « Laisse ce qui te met dans le doute pour ce qui ne t’y met pas ». »
(Hadith n°11/42, 40, rapporté par At-Tirmidhî n°2520 et An-Nassâ’î)
عَنْ أَبِي مُحَمَّدٍ الْحَسَنِ بْنِ عَلِيِّ بْنِ أَبِي طَالِبٍ سِبْطِ رَسُولِ اللَّهِ صلى الله عليه و سلم وَرَيْحَانَتِهِ رَضِيَ اللَّهُ عَنْهُمَا، قَالَ: حَفِظْت مِنْ رَسُولِ اللَّهِ صلى الله عليه و سلم « دَعْ مَا يُرِيبُك إلَى مَا لَا يُرِيبُك ».
وَالنَّسَائِيّ رَوَاهُ التِّرْمِذِيُّ [رقم:2520]،
Notre intuition est parfois notre meilleur baromètre ! Et pour l’éveiller, quoi de mieux qu’un petit questionnaire mental ? « Il/elle me pose cette question…Cela lui apporte-t-il quelque chose de le savoir, ou à moi de lui répondre ? » Je pense que nous serons unanimes sur la réponse…Certes, l’exemple peut paraître un peu caricatural, mais l’essence est là ! Ou encore « Je suis au téléphone avec il/elle, nous bavardons sans but précis…Cette situation me sied-elle ? ».
Cela peut paraître difficile à appliquer parfois, surtout lorsque nous sentons qu’il n y a pas d’ambiguïté (lors d’un appel par exemple). Mais croyez-moi, rien ne vaut la sensation d’avoir préservé sa dignité…
La tentation est forte…Comment réagir ?
Allah nous as créés êtres humains avec des sentiments, les deux sexes s’attrayant mutuellement. Cela n’est pas un mal en soi, comme on peut le voir avec les couples si unis que formaient les sahâbas et sahâbiyates (qu’Allah soit satisfait d’eux tous). Ressentir le besoin de discuter et d’interagir avec une personne précise n’est pas anormal, mais il doit être géré (notamment par le biais du mariage !). N’est-ce pas justement cette capacité-là, qui consiste à se maîtriser et ne pas suivre bêtement ses passions, qui nous place au-dessus des animaux, et fait de nous autres humains, les plus nobles créatures d’Allah ?
En raison de cela, un regard par inadvertance vers une personne qui nous plaît n’est pas un risque zéro…Laissez-moi vous spoiler la fin : c’est même inévitable ! Comment faire alors ? Une nouvelle fois, le Prophète (ﷺ) nous as tracé un chemin à suivre, à travers ce hâdith :
« Ô Alî, ne jette pas deux regards successifs sur une femme, car seul le premier t’es permis ».
Rapporté par al-Tirmidhî.
Le regard qui nous as échappé et pris par surprise, est une conséquence normale de la nature dont Allah nous as dotés. En revanche, le « second regard », qui lui est intentionnel et contrôlable, doit être évité.
Nous n’avons parlé ici que du regard, mais on peut appliquer ce principe à l’ensemble des actes régissant les liens entre les deux genres, qu’il s’agisse du sourire, de la conversation…
En réalité, le sujet des sentiments concernant la jeunesse est un sujet très vaste dont nous pourrions beaucoup parler…Mais ça, ce sera le sujet d’un prochain article, incha Allah !
Le regard de l’autre
Vient ensuite la question de la pression collective et surtout, de la peur de blesser : dans un contexte où les relations filles-garçons sans limites sont si normalisées, faire preuve de retenue peut-être perçu comme du rejet à l’égard d’une personne simplement gentille… Ce que nous considérons comme normal peut sembler choquant voire vexant. D’où la nécessité de faire preuve de tact : on peut tout à fait être relativement distant ou distante sans montrer de méchanceté. Et si jamais les exigences de vos semblables « gentils » sont trop élevées, vous gênent, et vont à l’encontre de vos principes, et bien…Tant pis ! Nous sommes tous d’accord sur le fait qu’on ne satisfait pas une créature en désobéissant au Créateur. C’est en restant fermes sur nos positions qu’Allah mettra sur notre chemin des personnes en adéquation avec notre vision des choses, qui nous conforteront dans notre démarche au lieu de nous freiner, bi idhni Lah.
De plus, les étiquettes de « casseur de délire », de « coincée », ou encore les accusations d’avoir « pris la grosse tête » ciblent malheureusement vite ceux qui s’opposent au moule. Des considérations qu’en tant que musulmans, nous ne sommes nullement obligés de suivre, bien au contraire ! Je suis tout à fait consciente d’à quel point cela peut-être difficile de nager à contre-courant et de se sentir étranger (je l’ai vécu aussi) mais rappelons que l’accès au Paradis n’est pas gratuit ! Garder nos convictions intactes et surtout les appliquer est un combat de tous les jours qui nous honore de par sa difficulté. À l’évidence, tout cela paraît bien plus simple à dire qu’à faire, mais avec l’aide d’Allah, rien ne pourra nous fragiliser ! Les jeunes musulmans doivent être des faisceaux de moralité dans l’obscurantisme. Sans être dans l’esprit de contradiction, à titre personnel, j’ai toujours aimé me sentir spéciale quand il s’agissait de suivre les lois de mon Seigneur !
Mais c’est comme mon frère !
Une idée bien tentante, n’est-ce pas ! « Il est comme un frère », ou « elle est comme ma sœur »… Dans certaines de nos relations avec le sexe opposé, il nous semble absolument évident que l’ambiguïté est impossible, tant le lien est bonifié et fraternel. À ceci, je me permettrais de répondre (quitte à paraître un peu crue) : cher frère, une fille n’est ta sœur que si elle est issue des mêmes parents que toi ! Et il en est de même pour le cas inverse… La réalité, c’est que nous ne connaissons jamais totalement les intentions des personnes avec qui nous interagissons et surtout, les dérapages sont l’apanage de l’être humain imprudent. Ne vaut-il pas mieux de conserver des rapports de frères et sœurs en Allah, dans le respect des règles, plutôt que de tenter d’arranger celles-ci selon nos souhaits ? Mieux vaut prévenir que guérir !
Si je puis me permettre une petite référence, notre génération, à ce sujet, s’amuse beaucoup du concept de « friendzone » : celui selon lequel une personne éprouve des sentiments pour une autre, tandis que cette dernière ne souhaite qu’un lien amical… Tout est dit ! Dans une relation, les deux côtés n’ont pas forcément les mêmes objectifs et c’est ce qui doit nous alerter sur la prudence à adopter.
D’autant que, si vous voulez mon avis, on n’agira jamais avec les autres comme avec nos véritables frères et sœurs…(je pense que beaucoup se reconnaîtront !).
La pudeur est le joyau du croyant
D’après Abou Massaoud ‘Uqbah Ibn ‘Amr Al-Ansârî Al-Badrî (Qu’Allah l’agrée) rapporte que le Messager d’Allah (ﷺ) a dit : « Parmi ce qui est parvenu jusqu’aux gens de la prophétie ancienne : « Si tu n’as pas de pudeur, fais ce que tu veux ». »
(Hadith n°20/42, 40 Hadith Nawawi, Rapporté par Al Boukhari)
عَنْ أَبِي مَسْعُودٍ عُقْبَةَ بْنِ عَمْرٍو الْأَنْصَارِيِّ الْبَدْرِيِّ رَضِيَ اللهُ عَنْهُ قَالَ: قَالَ رَسُولُ اللَّهِ صلى الله عليه و سلم « إنَّ مِمَّا أَدْرَكَ النَّاسُ مِنْ كَلَامِ النُّبُوَّةِ الْأُولَى: إذَا لَمْ تَسْتَحِ فَاصْنَعْ مَا شِئْت » .
(رَوَاهُ الْبُخَارِيُّ)
Cette parole de notre prophète et modèle (ﷺ) n’est-elle pas frappante ? Il s’adresse à nous en nous renvoyant à l’une des plus belles qualités de la religion musulmane. « Fais ce que tu veux… » Autrement dit, celui qui n’a pas de pudeur est décrit comme n’ayant plus de limites, il suit ses volontés sans songer aux conséquences de ses actes. Une attitude désapprouvée par notre éthique, qui nous encourage à perpétuellement nous maîtriser et user de notre cœur et de notre raison pour devenir la meilleure version de nous-mêmes.
Chers frères, chères sœurs, notre pudeur est une perle à la valeur inestimable que chacun d’entre nous se doit de préserver. Personne n’a le droit d’y porter atteinte. La décence dans notre tenue, nos paroles et nos actes dans leur globalité est le meilleur moyen de protéger notre trésor de la souillure à laquelle il peut être confronté. De cette seule qualité en naissent mille autres : la modestie, l’humilité, la fidélité… La pudeur, c’est faire preuve de respect envers soi, puis envers les autres. Une attitude bénie qui est le socle d’une vie de couple et de famille épanouie, et par là, un équilibre dans la société. Le musulman n’est-il pas un bien pour lui-même autant que pour ceux qui l’entourent ?
Qu’Allah nous permette d’avancer sur son chemin, qu’Il préserve les jeunes et les moins jeunes de Sa communauté de la turpitude et de la perdition, qu’Il fasse de nous de jeunes adultes respectueux et accomplis, puis des parents responsables et transmetteurs.
آمين
Inès G.
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Salem Inès
Je trouve ton article très utile et bien écrit et on a bien besoin de parler de ce sujet là autour de nous entre ados ! En plus avec les parents et la famille c’est un peu tabou de parler des relations hommes-femmes et même avec les cousins du coup tu sais pas trop quoi faire… c’est confus
Merci vraiment pour tes articles j’aime trop ton style d’écriture et la manière décontractée avec laquelle tu nous parle comme si t’étais devant moi !
Qu’Allah te facilite dans ta vie et te comble de Ses bienfaits, que tu trouve le bonheur que tu mérite amine