De magnifiques conseils d’un père à son fils – Partie 1

Nous nous intéresserons le temps de deux articles aux enseignements tirés du récit de Luqman dans notre Coran.

Les conseils que prodiguent Luqman à son fils auraient dû/pu faire l’objet de notre tout premier article dans la rubrique éducation en réalité, car les recommandations que nous livre ce récit sont de précieux conseils éducatifs intemporels qui posent les bases d’une éducation religieuse solide.

 

Ce récit est un parfait exemple illustrant comment le parent, l’éducateur, appelle l’enfant à Allah.

 

Ainsi, parents, éducateurs, enseignants, nous nous devons d’accorder une attention toute particulière à ces recommandations, les méditer afin de les appliquer à notre réalité et afin de les enseigner et d’appeler nos enfants, nos jeunes, au message suprême de l’Islam.

 

Allah, dans la sourate Luqman (sourate 31, Ayahs 12 à 19), nous relate ainsi le récit de Luqman :

وَلَقَدْ آتَيْنَا لُقْمَانَ الْحِكْمَةَ أَنِ اشْكُرْ لِلَّهِ وَمَن يَشْكُرْ فَإِنَّمَا يَشْكُرُ لِنَفْسِهِ وَمَن كَفَرَ فَإِنَّ اللَّهَ غَنِيٌّ حَمِيدٌ

Nous avons effectivement donné à Luqman la sagesse : « Sois reconnaissant à Allah, car quiconque est reconnaissant, n’est reconnaissant que pour soi-même ; quant à celui qui est ingrat… En vérité, Allah se dispense de tout, et Il est digne de louange ».

 

Allah a accordé à Luqman la sagesse. La sagesse est un don que Dieu accorde à qui Il veut et dont Il qualifie Ses prophètes dans le Coran, comme c’est le cas par exemple pour Daoud ou Issa – que la paix soit sur eux-, ou encore tout autre homme de Son choix, comme c’est le cas ici pour Luqman.

 

Avant de nous livrer les conseils que Luqman adressa à son fils, Allah nous présente Luqman, qui il était. C’était un homme sage et pieux. Luqman avait tellement purifié son cœur et son âme, il s’était tellement rapproché d’Allah, il avait atteint un tel degré de sagesse, il observait une telle éthique dans sa vie, qu’Allah l’a cité dans le Coran et ainsi une sourate toute entière porte son nom, la sourate Luqman. Quel honneur !

 

Pour autant la majorité des savants s’accordent sur le fait que Luqman n’était pas un prophète, c’était un homme, mais Allah l’a distingué en le citant dans Son noble Coran, en nommant une sourate toute entière à son nom, et en citant ses conseils, les conseils d’un père sage et avisé à son fils.

 

Luqman, nous l’avons dit, était un homme sage et pieux. Un modèle donc pour ses enfants. Voilà le tout premier enseignement à retenir de ces ayahs, la base, la règle n°1. Soyons des exemples pour nos enfants.

 

Les enfants apprennent d’abord en imitant, on dit que l’enfant est le miroir des parents. Si les parents veulent des enfants pieux, ils devront eux-mêmes faire preuve de piété. Si nous voulons de belles qualités chez nos enfants, nous devons les cultiver en nous. Chaque parent, chaque éducateur, chaque enseignant, doit s’efforcer d’incarner les valeurs qu’ils souhaitent voir chez son enfant ou son élève. Les parents ont en premier lieu un rôle de modèle. La famille est l’environnement social le plus important pour l’enfant qui en ressent les caractéristiques et les ambiances avant même de comprendre les mots. L’environnement familial doit donc être propice au développement de la foi de l’enfant.

 

Après la ayah n°12, Allah nous raconte dans les ayahs suivantes les conseils que prodigue Luqman à son fils, au travers desquels, Dieu nous donne les grandes lignes éducatives à suivre pour bien accompagner son enfant.

وَإِذْ قَالَ لُقْمَانُ لِابْنِهِ وَهُوَ يَعِظُهُ يَا بُنَيَّ لَا تُشْرِكْ بِاللَّهِ إِنَّ الشِّرْكَ لَظُلْمٌ عَظِيمٌ

« Et lorsque Luqmân dit à son fils tout en l’exhortant: «O mon fils, ne donne pas d’associé à Allah, car l’association à [Allah] est vraiment une injustice énorme.»

 

Voyons ici la manière qu’adopte Luqman pour communiquer avec son fils. Faisons une petite pause sur l’emploi du mot « يَعِظُهُ » en arabe, traduit ici par « exhorter ». « يَعِظُهُ » vient de «وَعَظَ» qui signifie exhorter mais qui contient aussi la notion de conseiller et de rappeler notamment les conséquences. On peut aussi l’employer pour la réprimande ou l’admonestation, c’est aussi enjoindre à ce qui est bien et interdire ce qui est mal.

 

Nous pouvons constater que se situe au même niveau l’incitation et la dissuasion. On verra par la suite que Luqman dans ses recommandations inclura une incitation bénéfique qui encouragera son enfant à accomplir le bien de la meilleure des manières et une mise en garde convaincante qui le dissuadera d’approcher le péché avec les conséquences.

 

Maintenant, voyons comment Luqman interpelle son fils, il emploie l’expression « يَا بُنَيَّ» traduit par « Ô mon fils ». En arabe l’usage de « يَا بُنَيَّ» est un terme tendre, affectueux, qu’on pourrait traduire par « mon cher enfant » ou « mon petit enfant » , ce terme marque une proximité. Cette façon de communiquer affectueuse et bienveillante instaure une confiance et témoigne de l’amour du parent envers son enfant. De cette façon, le parent gagne le cœur de son enfant.  

 

De la même manière, le Prophète Muhammad ﷺ s’adressa au jeune compagnon Mou’adh Ibn Jabal.

 

Mou’adh raconte que le Messager de Dieu ﷺ lui saisit une fois la main et lui dit : « Ô Mou’adh ! Par Dieu je t’aime. Puis je te recommande ô Mou’adh de ne jamais manquer de dire à la fin de chaque prière : « Seigneur Dieu ! Aide-moi à T’évoquer, à Te remercier, et à T’adorer comme il se doit ». (Hadith rapporté par Abu Dawud et Annasa’i).

 

Ce récit vient confirmer l’approche à adopter lorsque nous voulons enseigner, former, appeler à Allah ; Notre bien aimé Prophète ﷺ, avant de transmettre sa recommandation à Mou’adh, a fait preuve de tendresse, de délicatesse et de sagesse. À l’instar de notre Prophète ﷺ  et de Luqman, nous devons commencer par témoigner notre amour, notre affection pour ensuite transmettre la bonne recommandation.

De nombreux hadiths nous rapportent la relation d’affection et d’amour que développait notre bien aimé Prophète ﷺ avec les enfants qui l’entouraient. Il investissait donc dans un lien d’amour et de confiance avant tout.

La déclaration d’amour faite par notre Prophète ﷺ  lorsqu’il s’adresse à Mou’adh, apaise son cœur, le rend plus réceptif au message, et l’encouragera et le motivera à appliquer les recommandations qui vont suivre.  

Et c’est aussi parce que le parent aime son enfant, qu’il le conseille et qu’il l’oriente vers le bien. Il est nécessaire de le rappeler à l’enfant et il est nécessaire d’entretenir un lien d’amour et de confiance avec l’enfant ou le jeune qu’on appelle à Allah. Voici notre deuxième leçon.  

 

Le tout premier conseil que donne Luqman à son fils et celui de l’Unicité :

« لَا تُشْرِكْ بِاللَّهِ إِنَّ الشِّرْكَ لَظُلْمٌ عَظِيمٌ»

 

Ne rien associer à Dieu, Allah est Unique et Le Seul digne d’être adoré. Allah est le Créateur, Allah est le Seigneur des univers.

Ne rien associer à Dieu, pour être libre, libre des croyances futiles, libre du culte de soi, libre du matérialisme, libre du divertissement, etc.

 

Luqman commence par poser les bases d’un monothéisme absolu.

 

Comment enseigner l’unicité ? Dès la plus tendre enfance, avec l’apprentissage de l’attestation de foi. Mais bien sûr cela ne s’arrête pas là. Le parent appelle son enfant à connaitre son Créateur. Il l’interpelle pour observer les belles choses en lui indiquant qu’elles ont été créées par Allah. Quand l’enfant est malade, le parent lui montre qu’on invoque Allah pour le guérir, qu’on remercie Allah avant de se nourrir, etc.

Les occasions quotidiennes ne manquent pas pour enraciner petit à petit dans le cœur du jeune enfant la connaissance et la conscience d’Allah. Enseigner et expliquer également les Noms et Attributs divins aux enfants est un excellent moyen pour apprendre à connaitre Allah, à l’aimer et à le craindre.

Enseigner les invocations et les évocations, extraites du Coran et de la Sunna.

Raconter les histoires des Prophètes, que la paix soit sur eux, les histoires du Coran, les histoires des compagnons etc.

 

Enseigner aux enfants, dès leur plus jeune âge que Dieu existe, qu’Il est Unique, en éduquant leur cœur à reconnaitre ce qui de droit revient à Allah leur permettra de se prémunir contre l’association (le shirk) majeur et mineur.

 

« وَوَصَّيْنَا الْإِنسَانَ بِوَالِدَيْهِ حَمَلَتْهُ أُمُّهُ وَهْنًا عَلَى وَهْنٍ وَفِصَالُهُ فِي عَامَيْنِ أَنِ اشْكُرْ لِي وَلِوَالِدَيْكَ إِلَيَّ الْمَصِيرُ »

وَإِن جَاهَدَاكَ عَلَى أَن تُشْرِكَ بِي مَا لَيْسَ لَكَ بِهِ عِلْمٌ فَلَا تُطِعْهُمَا وَصَاحِبْهُمَا فِي الدُّنْيَا مَعْرُوفًا وَاتَّبِعْ سَبِيلَ مَنْ أَنَابَ إِلَيَّ ثُمَّ إِلَيَّ مَرْجِعُكُمْ فَأُنَبِّئُكُم بِمَا كُنتُمْ تَعْمَلُونَ

« Nous avons commandé à l’homme [la bienfaisance envers] ses père et mère; sa mère l’a porté [subissant pour lui] peine sur peine: son sevrage a lieu à deux ans. «Sois reconnaissant envers Moi ainsi qu’envers tes parents. Vers Moi est la destination. 

Et si tous deux te forcent à M’associer ce dont tu n’as aucune connaissance, alors ne leur obéis pas; mais reste avec eux ici-bas de façon convenable. Et suis le sentier de celui qui se tourne vers Moi. Vers Moi, ensuite, est votre retour, et alors Je vous informerai de ce que vous faisiez».

 

La leçon suivante est celle de la gratitude. Dans sourate Al A’raf, Allah nous relate ce qu’a dit Iblis : « Je m’assoirai pour eux en travers de ton droit chemin » (Ayah 16). Abou Hamid Al Ghazali dit qu’il s’agit ici du chemin de la gratitude, en effet dans le verset suivant Iblis poursuit : « Et pour la plupart, Tu ne les trouveras pas reconnaissants. » (Ayah 17)

 

Et pourtant Allah nous promet de nous accorder davantage de bienfaits lorsque nous faisons preuve de reconnaissance : « Si vous êtes reconnaissants, très certainement j’augmenterai (Mes bienfaits) pour vous. » (Sourate Ibrahim, Ayah 7).

 

Les bienfaits d’Allah sont innombrables, dans ce bas monde et dans l’au-delà, et le parent doit veiller à inculquer la conscience profonde que tout bienfait émane de Dieu, qu’Il est le Seul Dispensateur, et qu’être reconnaissant envers Allah relève du monothéisme pur.

 

Transmettre la gratitude à nos enfants et l’un des plus beaux cadeaux que l’on puisse leur offrir, la gratitude est la clé du bonheur ici-bas et dans l’au-delà … La gratitude permet d’être comblé et satisfait.

 

Comme toujours, nous réussissons à transmettre les valeurs d’abord en les incarnant, en les exprimant, en louant et remerciant régulièrement Allah.

 

La gratitude envers les parents vient tout de suite après la gratitude envers Allah. La bienfaisance envers les parents vient juste après l’Unicité de Dieu, et ce dans plusieurs versets du Coran et l’ingratitude envers ses parents est un péché majeur qui aura des conséquences dans ce bas monde et dans l’au-delà.

 

Exprimer l’amour et la gratitude des parents et particulièrement la mère qui a éprouvé et enduré pour son enfant : elle endure la douleur de la grossesse, de l’accouchement, puis de l’allaitement. Allah insiste sur les fatigues et les peines que supportent la mère pour son enfant, nuit et jour, afin que celui-ci soit reconnaissant envers ses parents.

La piété filiale est ainsi associée au monothéisme, la gratitude envers les parents est corrélée à la gratitude à l’égard d’Allah et la bienfaisance envers eux figure parmi les œuvres les plus appréciées d’Allah. Ce lien avec les parents nourrit l’amour et la miséricorde dans le cœur du croyant et renforce son lien avec l’Unique.

 

Il existe de nombreuses illustrations de bon comportement envers les parents parmi les compagnons et les pieux prédécesseurs, mais voici une anecdote de l’imam Ash-Shafi’i, qui a été élevé par sa mère seule et qui lui témoignait un respect sans faille. Lors des repas qu’il partageait avec elle, il ne tendait jamais sa main vers le repas avant que sa mère ne finisse de manger. Lorsqu’on l’interrogea à ce sujet il répondit : « J’ai peur que ma main ne devance la sienne et qu’elle prenne ce dont elle avait envie. » Voilà un bel exemple de respect et de bienfaisance envers sa mère.

 

يَا بُنَيَّ إِنَّهَا إِن تَكُ مِثْقَالَ حَبَّةٍ مِّنْ خَرْدَلٍ فَتَكُن فِي صَخْرَةٍ أَوْ فِي السَّمَاوَاتِ أَوْ فِي الْأَرْضِ يَأْتِ بِهَا اللَّهُ إِنَّ اللَّهَ لَطِيفٌ خَبِيرٌ

«Ô mon enfant, fût-ce le poids d’un grain de moutarde, au fond d’un rocher, ou dans les cieux ou dans la terre, Allah le fera venir. Allah est infiniment Doux et Parfaitement Connaisseur. »

 

Luqman éduque son enfant à avoir constamment conscience de la surveillance d’Allah. Il lui enseigne l’importance de vivre dans la présence de Dieu. Personne ne peut exercer sur les enfants une surveillance accrue, cela est impossible et vite étouffant pour l’enfant… À partir de la puberté, nous l’avons précédemment évoqué, le jeune a besoin d’indépendance. En inculquant la conscience divine, dès le plus jeune âge, l’enfant sera attentif à son comportement.

 

A travers cet enseignement, Luqman rappelle également le fait qu’on retournera tous vers Allah, cela est répété à plusieurs reprises dans le récit de Luqman « Vers Moi est la destination » ; « Vers moi, ensuite, est votre retour ».

 

Nous pouvons également constater que dans les recommandations de Luqman, plusieurs noms et attributs divins sont évoqués à plusieurs reprises. Il est d’une importance fondamentale, d’enseigner les noms et attributs d’Allah à nos enfants, afin qu’ils connaissent leur Créateur.

 

Cet enseignement nous rappelle également que le jour du Jugement ; la balance de nos œuvres aura la précision d’un atome comme nous le dit Allah dans le Coran aux ayahs 8 et 9 de la sourate Al Zalzala : « Quiconque fait un bien fût-ce du poids d’un atome, le verra, et quiconque fait un mal fût-ce du poids d’un atome, le verra. »

 

Tout est comptabilisé, consignés dans nos livres, fût-il en quantité infime. Le jour J, nos actions seront exposées fût-ce le poids d’un grain de moutarde…

 

À suivre …

 

Meriem

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