Pourquoi nous fermons notre compte Instagram

L’algorithme
Meta, TikTok, X, Snapchat… L’IA de ces plateformes usent d’algorithmes pour classer et prédire ce qui pourrait intéresser l’utilisateur que nous sommes et se met à jour en fonction de nos réactions. C’est ainsi que l’algorithme ordonne nos contenus.

Depuis l’explosion de TikTok, la vidéo courte a pris le dessus sur tous les autres formats, les algorithmes privilégient donc de plus en plus la vidéo et les contenus internes générés par les créateurs de contenu et traitent les liens externes comme du spam.

L’invisibilisation des liens externes a pour conséquence de mettre en difficulté les articles hébergés sur les sites. L’invisibilisation de l’écrit au profit du format vidéo court, force aussi les rédactions à adopter un format standardisé.

L’écriture et la lecture sont nos activités phares, elles sont les principaux outils de notre action. Or les utilisateurs des réseaux sociaux font face à une telle sollicitation de flux d’information qu’ils n’ont plus la force mentale de lire et préfèrent une vidéo sympa et bien rythmée qui résumera en deux minutes, ce qu’un article traitera en 500 mots au moins.  

L’envie d’être présent sur une plateforme qui ne valorise ni l’intelligence, ni la profondeur, mais qui favorise les contenus simplets et éphémères, fortement générateurs de clics, n’est juste pas présente au sein de notre rédaction.

Nous n’avons pas les codes et nous ne cherchons pas à les avoir…

L’addiction
Une scène quotidienne dans le métro parisien : quasiment tous les usagers, écrans à la main, font défiler frénétiquement, du bout de leur doigt, images et vidéos…

L’effet dopamine des écrans est aujourd’hui connu et reconnu, et la dépendance au smartphone et notamment aux réseaux n’est pas sans conséquence : manifestation de l’anxiété, sommeil de mauvaise qualité notamment due à la peur de « rater quelque chose », bruxisme (grincement des dents), et autres effets négatifs sur le cerveau humain stimulé en permanence par un flux d’information et de notifications.

On sait aujourd’hui que les réseaux malmènent (en toute connaissance de cause) la santé mentale des plus jeunes.

On sait aussi que les réseaux captent l’attention à tout prix, attention indispensable pour mener activités diverses du quotidien… En étant sollicités en permanence, par des notifications intrusives et intempestives, une fatigue décisionnelle s’installe. Les capacités de raisonnement de discernement et même de décision se trouvent en conséquence entravées.

Nous ne souhaitons tout bonnement plus participer au méfait. 

Le temps
4h48 par jour sur le smartphone en moyenne, ce qui représente 1/3 de la journée. Sur 10 minutes passées sur le smartphone 7 sont consacrés aux réseaux sociaux [1]. Le temps passé sur les réseaux absorbe l’existence.

Ce nouveau capitalisme numérique s’attaque à notre temps. Pour que nous consommions toujours plus, les plateformes proposent de regarder des vidéos, des séries, mais aussi d’écouter des audios en accélérés, en x2… Pour aller toujours plus vite et consommer toujours plus. La fonction autoplay de YouTube ou Netflix qui précharge et lance directement la vidéo suivante illustre parfaitement les dispositifs mis en œuvre pour nous voler encore un peu plus de notre temps ; aucun instant que nous avions de libre auparavant n’est épargné : trajet, repas, pause au travail, « Nous sommes en compétition avec le sommeil » déclarait le fondateur de Netflix.

Dans son livre « la civilisation du poisson rouge » Bruno Patino nous explique comment nous avons perdu la maitrise de notre temps. Comment nous l’avons cédé aux plateformes contre quelques informations, quelques conversations, mais elles nous ont plongé dans une immédiateté perpétuelle. Grâce aux données personnelles que nous avons offerts, une vraie économie de l’attention a vu le jour, et nous voyons nos jeunes et moins jeunes, noyés, hyperconnectés, se rendant disponible pour un nombre croissant de sollicitations, de notifications au détriment de ce que nous avons de plus précieux : notre temps.

Les réseaux sociaux ou plutôt le délitement du lien social…
Avec les réseaux sociaux, il n’y a plus de frontières entre privé et public, l’émotion l’a emporté sur la raison, l’algorithme l’a emporté sur l’humain. Le digital n’est plus au service de l’homme, l’homme est asservi au digital…

Le lien social n’a certes pas attendu le numérique pour entrer en crise, la fragilisation de la famille, notre mode de vie urbain et individualiste sont quelques causes que nous pouvons citer à l’origine du délitement des liens sociaux.

Mais les plateformes qu’ont dit « sociales » accélèrent ce délitement, ces plateformes isolent : on regarde chacun seul sur son écran son film Netflix au lieu et en place de visionner un film en famille. On préfèrera scénariser sa vie sur Instagram, plutôt que de profiter quelques heures avec ses amis loin de son iPhone… Même les moments heureux de son couple ne sont plus respectés : on félicite son conjoint publiquement pour l’obtention de son diplôme, on poste sur Instagram le cadeau qu’il ou elle nous a offert et on partage sur Snapchat notre week-end en bord de mer… Naissances, mariage, divorce, maladie, et même la mort… l’impudeur n’a plus de limite ! 

Addictions, exhibition de soi, perte d’identité, narcissisme, harcèlement, violence, conséquences sociales et politiques délétères [2] voilà les risques individuels et collectifs induits par ces réseaux dits sociaux et ces plateformes numériques.

On dit l’outil « neutre », qu’il peut être utilisé à bon escient… Peut-être qu’il l’était, mais il ne l’est pas ou ne l’est plus. Les conséquences sont trop importantes pour être niées ou bien faire comme si elles n’existaient pas. Le mal est trop grand, trop important.

Ainsi, nous fermons notre compte Instagram et quittons tous les réseaux dévoreurs de temps et d’attention.

Au demeurant, nous refusons que nos publications sur les réseaux soient plus importantes que nos articles et nous sommes convaincus que nous pouvons exister sans Instagram. Si Dieu le veut.

 

[1] Rapport « state of mobile 2022 » d’App Annie
[2]  https://www.lecese.fr/content/lsrs2014

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